dimanche 22 janvier 2012

Obama face à l'Amérique (par Russell Banks)


"Pratiquement n'importe quel républicain un tant soit peu télégénique est susceptible de battre Obama en novembre prochain", nous explique ici l'écrivain progressiste Russell Banks, qui fut l'un des premiers à soutenir Barack Obama lors de sa première campagne présidentielle, à un moment où personne, en Europe, ne connaissait encore son nom. (© JIM WATSON/AFP)
"Pratiquement n'importe quel républicain un tant soit peu télégénique est susceptible de battre Obama en novembre prochain", nous explique ici l'écrivain progressiste Russell Banks, qui fut l'un des premiers à soutenir Barack Obama lors de sa première campagne présidentielle, à un moment où personne, en Europe, ne connaissait encore son nom. (© JIM WATSON/AFP)
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Le Nouvel Observateur Vous avez compté parmi les premiers partisans d'Obama. Après trois ans à la présidence, son taux de popularité est beaucoup plus bas que celui de ses prédécesseurs au même stade de leur mandat. Est-ce injuste ou justifié?
Russell Banks Même si effectivement j'ai été très tôt - et je demeure - un partisan d'Obama, mon soutien s'est toujours accompagné de sérieuses réserves. Pour nous qui nous situons à gauche (et qui ne représentons plus que 20% à peine des électeurs), Obama était, en 2008, le meilleur candidat éligible que pouvait offrir le système actuel. Il était déjà flagrant qu'il n'était pas de gauche, encore moins révolutionnaire, et sans doute même pas progressiste, selon la vieille tradition du progressisme américain tel que l'ont incarné les Roosevelt (Theodore et Franklin), les Kennedy (John et Robert) et Lyndon Johnson.
A vrai dire, si Barack Obama avait été un authentique progressiste, même un progressiste blanc, il n'aurait sans doute pas battu ses adversaires aux primaires démocrates, et, dans tous les cas, il n'aurait jamais été élu président.
Les Américains dans leur ensemble sont devenus beaucoup plus conservateurs. Cela fait plus d'un demi-siècle que le centre politique dérive vers la droite, selon un processus d'abord lent qui s'est accéléré dans les années 1980, les années Reagan. On peut discuter sans fin des raisons de ce phénomène - qui n'est pas entièrement imputable aux magouilles des républicains conservateurs, à Fox News, ou à la rhétorique apocalyptique déployée par les prédicateurs évangéliques -, mais on peut assurément dire que nous sommes devenus un peuple plus craintif qu'autrefois; or une masse effrayée tend à s'armer et à se barricader contre toute chose et toute personne extérieures à la forteresse.
Obama a été élu au commandement du «Fort Amérique» parce qu'il avait promis de nous apporter le changement sans nous obliger à changer quoi que ce soit - de faire une distinction sans faire de différence - en offrant une image de compétence face à l'incompétence, et parce qu'il se présentait contre John McCain, un candidat qui pour trop de gens évoquait le vieil oncle revenu fêlé d'une guerre survenue bien avant leur naissance, et contre Sarah Palin, qui pour trop de gens évoquait l'ex-miss convaincue que la Bible a été directement dictée par Dieu en anglais.
Obama s'est révélé être un centriste, et c'est cela qui a exaspéré les survivants de la gauche américaine. Ils se sentent non seulement déçus mais piégés, trahis, manipulés par son identité raciale, sa rhétorique électorale et son physique télégénique. C'est absurde, bien sûr; ils ont été piégés par leur propre naïveté, manipulés par leurs propres préjugés sociaux et raciaux (un Noir éloquent, formé dans les meilleures universités, qui a fait du travail associatif de terrain à Chicago et écrit un superbe livre autobiographique sur son expérience métissée des Etats-Unis, doit forcément être progressiste).
RUSSELL BANKS
RUSSELL BANKS est l'auteur de nombreux romans dont «De beaux lendemains» et «Affliction», portés au cinéma par Atom Egoyan et par Paul Schrader; bientôt «American Darling» sera adapté par Martin Scorsese. Russell Banks a dernièrement publié «la Réserve» (Actes Sud), et son nouveau roman, «Lointain Souvenir de la peau», paraîtra le 7 mars chez Actes Sud. (©Ulf Andersen/Sipa)
A l'autre extrémité de l'éventail politique, on trouve les 20% d'électeurs qui méprisent Obama parce qu'il s'est révélé incarner leur pire cauchemar: un Noir éloquent, formé dans les meilleures universités, qui a fait du travail de terrain à Chicago et écrit tout seul un superbe livre! Et il aggrave son cas: il est mince, athlétique, aussi élégant en costume-cravate lors des sommets du G8 qu'en maillot de bain sur les plages d'Hawaii. Pour ces gens, il constitue un danger racial, et donc sexuel.
A leurs yeux, il n'est pas exclu que ce soit un musulman infiltré, et il n'est sans doute même pas né aux Etats-Unis (voir les propos de Newt Gingrich, l'un des actuels favoris des primaires républicaines qui affirme haut et fort que les Palestiniens n'existent pas [sic], et selon lesquels Obama aurait «une vision anticoloniale typiquement kenyane»). Pis encore: il se pourrait bien qu'il soit communiste.
Reste son impopularité massive auprès du reste des Etats-Unis, de la majorité silencieuse qui espérait que, quoique noir et instruit, il ne se révélerait pas un progressiste infiltré. Cela comprend la plupart des démocrates modérés qui ont voté pour lui, plus de nombreux républicains bon teint qui n'ont soutenu McCain qu'à contre-coeur et parce qu'ils ont toujours voté républicain, sans oublier les 20% d'électeurs qui se qualifient d'indépendants et qu'on pourrait baptiser «bisexuels», puisqu'ils votent à voile et à vapeur (un coup pour les républicains, un coup pour les démocrates - et ce sont souvent eux qui font pencher la balance).
Puisque Obama s'est effectivement révélé être ce que souhaitait cette majorité d'Américains, à savoir un centriste, et non un gauchiste infiltré, comment expliquer son impopularité globale auprès d'eux? Lorsque les choses tournent mal, que l'économie capitaliste s'effondre, que l'Etat paraît impuissant, que l'environnement se dégrade et que les infrastructures du pays se démantèlent, lorsque la corruption semble contaminer tous les aspects du fonctionnement politique, nous avons tendance à en rejeter la faute sur le président en exercice plutôt que sur l'histoire en marche. C'est plus commode que d'admettre que nous sommes entrés, en tant que nation, dans une phase de déclin irréversible, que nous ne goûterons pas un autre «siècle américain», et que nos enfants et petits-enfants ne vivront pas aussi bien que nos parents et grands-parents. Il nous faudrait dire adieu au double mythe de l'exception américaine et du prétendu rêve américain. Alors on préfère rejeter la faute sur le président.
Obama a-t-il laissé passer une occasion historique de réformer en profondeur ce système financier qui a causé tant de dégâts aux Etats-Unis et dans le monde?
Il aurait peut-être bien été en mesure de réformer le système financier américain, s'il n'avait pas choisi pour conseillers et membres de son cabinet des gens comme Timothy Geithner et Lawrence Summers, inféodés aux personnes et aux institutions directement responsables de la crise, et si le Congrès n'avait pas été sous la coupe du lobby de la finance.
De toute façon, l'économie américaine est aujourd'hui inextricablement liée à l'économie mondiale, et l'on ne saurait en réformer une partie sans réformer l'ensemble, ce qui ne risque pas d arriver, à moins d'un effondrement économique généralisé aux conséquences catastrophiques: dépression planétaire, inflation incontrôlable, afflux de réfugiés fuyant le sud pour le nord et l'est pour l'ouest, famines, émeutes, écroulement massif des infrastructures, coups d'Etat militaires et pis encore - une apocalypse économique qui ne nous laisserait d'autre choix que de repartir de zéro, en vivant de chasse et de pêche et en recourant au troc pour nous procurer à manger et un toit. Et qui aurait envie de ça, même au nom de la réforme? 
Occupy Wall Street
Des membres du mouvement Occupy Wall Street manifestent à Los Angeles, le 3 octobre 2011. (©FREDERIC J. BROWN/AFP)
L'économie américaine stagne, le chômage demeure très élevé et l'inégalité entre les plus riches et les plus pauvres n'a jamais été aussi criante. Quelle est votre analyse du mouvement Occupy Wall Street, dont le slogan «Nous sommes les 99%» souligne ce fossé social, et quelle influence peut-il avoir?
Je crois que les marchés bio hebdomadaires qui fleurissent partout aux Etats-Unis, particulièrement dans les zones rurales, ont plus de chances de mettre un terme à l'industrialisation de la chaîne alimentaire que le mouvement Occupy Wall Street n'en a d'influencer la politique économique de Washington. Je suis désolé de paraître si pessimiste, car j'admire le courage de ces manifestants prêts à braver les violences policières et les quolibets dont on les accable.
Cependant, leur idéologie dominante est fondamentalement anarchiste, ce qui les empêche de formuler des objectifs précis et un programme apte à séduire les millions d'Américains, dont ils affirment à juste titre dénoncer la souffrance, comme les millions d'autres qui ne soufrent pas. En outre, cette idéologie a tenu à l'écart du mouvement toute personne susceptible d'apparaître comme un leader, un Lech Walesa, un Václav Havel, un Martin Luther King, une figure charismatique qui saurait parler au plus grand nombre, et singulièrement aux pauvres et aux chômeurs, aux personnes âgées qui ne vivent que de l'aide sociale, à ceux qui n'ont pas d'assurance ou qui vont voir leur maison saisie, aux jeunes qui ne peuvent pas se payer d'études universitaires sans s'asservir aux banques, aux millions de personnes qui ont perdu dans la débâcle financière leurs économies soigneusement investies, et ainsi de suite.
Les tactiques et les stratégies du mouvement Occupy Wall Street me paraissent incohérentes et quelque peu complaisantes. Ses membres prétendent copier celles des manifestants du «printemps arabe»; mais dans ce dernier cas les objectifs étaient clairs et sans concession, l'adversaire, une dictature brutale et non une ploutocratie d'entreprise se posant en démocratie, et des martyrs, parfois par centaines, ont été prêts à donner leur vie pour faire avancer le mouvement.
Par ailleurs, dire «Nous sommes les 99% », c'est ne rien dire des différences de classe. Ne rien dire de la pauvreté et du chômage. Après tout, la plupart des Américains, au moins «les 60%», ne sont pas dans la misère ni au chômage. La plupart des Américains ne risquent pas de voir leur maison saisie par la banque. La plupart des Américains disposent d'une forme d'assurance-maladie. En revanche, une immense majorité d'Américains, peut-être même «les 99%», répugnent à s'infliger des impôts suffisants pour fournir une couverture médicale universelle, éradiquer la pauvreté, le chômage et le problème des sans-logis, et reconstruire les infrastructures. Le voilà, le problème: c'est un problème éthique qui ne saurait avoir de solution que politique.
La politique d'obstruction pratiquée par les républicains au Congrès vient d'empêcher Obama de négocier une réduction de la dette américaine. Le système politique américain, fondé sur l'équilibre des pouvoirs et des contrepouvoirs, paralyse-t-il la démocratie?
Le principe de l'équilibre des pouvoirs («checks and balances») constitue l'un des procédés constitutionnels visant à nous protéger de la tyrannie d'une minorité, et à empêcher l'un ou l'autre des trois pouvoirs - l'exécutif, le législatif et le judiciaire - d'imposer des décisions autonomes. En pratique, c'est généralement ce qui se passe. En fait, la paralysie qui frappe Washington est imputable avant tout à une neutralisation mutuelle, au sein du pouvoir législatif, entre le Sénat contrôlé par les démocrates et la Chambre des représentants contrôlée par les républicains; elle reflète moins un confit d'idéologies qu'un match nul invisible entre deux groupes d'intérêts financiers puissants: ceux qui ont financé les parlementaires républicains contre ceux qui ont financé les parlementaires démocrates.
Nous finançons avant tout nos élections à coups de donations versées par les riches, si bien que nos politiciens se retrouvent inféodés à ceux qui leur paient leur siège. (Il faut beaucoup d'argent pour convaincre une majorité d'Américains de voter contre leurs propres intérêts.) Voilà ce qui paralyse la démocratie américaine.
Pour avoir une quelconque chance d'être élu président, un candidat doit désormais récolter plus d'un milliard de dollars de fonds de campagne; il faut parfois 100 millions de dollars pour remporter un siège au Sénat, et presque autant pour être élu gouverneur, représentant, voire maire d'une grande ville comme New York.
Mitt Romney et Newt Gingrich
Mitt Romney et Newt Gingrich, lors d'un débat présidentiel à Des Moines (Iowa), le 10 décembre 2011. (©JIM WATSON/AFP)
Comment expliquez-vous que les primaires républicaines prennent l'allure d'un spectacle de carnaval? Les «tea parties» ont-elles fini par contaminer le Parti républicain tout entier?
Ce ne sont pas tant les tea parties qui ont transformé les primaires républicaines en une émission de télé-réalité permanente que tout le processus politique qui a été peu à peu absorbé par l'industrie du spectacle. Aujourd'hui, la plupart des Américains puisent leur «information» auprès des comiques de la chaîne Comedy Channel et de l'émission «Saturday Night Live», des blogueurs, de commentateurs tels que Rush Limbaugh (pour la droite) et Rachel Maddow (pour la gauche), et des simulacres de journalisme offerts par CNN et les trois grands réseaux télévisés nationaux, pour lesquels le procès du médecin de Michael Jackson a plus d'importance que le «printemps arabe» ou la guerre en Afghanistan.
Les candidats à la présidence sont perçus et évalués par le public comme des hommes et des femmes de spectacle. C'est ce que les médias exigent d'eux, comme ils l'exigent des sportifs. Peu importe que le candidat soit républicain ou démocrate, même si pour l'heure, en tant que candidat démocrate incontesté, Obama a échappé aux débats télévisés avec des bouffons du calibre de Michele Bachmann, Rick Perry Newt Gingrich et Herman Cain. Voilà pourquoi Newt Gingrich est actuellement l'un des favoris des primaires républicaines, avec Mitt Romney: Newt fait le spectacle, il est plus distrayant que Mitt. (Même leurs noms, Newt et Mitt, leur donnent l'air d'un duo comique: l'auguste et le clown blanc.)
Il y a quatre ans, Bush avait rendu les Etats-Unis odieux aux yeux du monde. Quoique interventionniste, la politique étrangère d'Obama a permis entre autres de soutenir pacifiquement les avancées démocratiques dans le monde arabe. Son bilan est-il selon vous positif? Et a-t-il redoré l'image des Etats-Unis dans le monde?
C'est avant tout l'absence de George W. Bush et de son éminence grise Dick Cheney qui a permis aux Etats-Unis d'améliorer leur image dans le monde, peut-être surtout d'ailleurs en Europe de l'Ouest. (Certes, il n'est pas négligeable qu'Obama soit notre premier président non blanc, ce qui a renforcé notre réputation de méritocratie multiraciale.) Obama aurait eu du mal à égaler l'impopularité de Bush à l'étranger; après lui, il ne pouvait qu'offrir une meilleure image des Etats-Unis. Obama, c'est avant tout le non-Bush. Peu importe qu'il ait largement poursuivi la politique étrangère belliciste de Bush (en particulier celle de son second mandat) en Irak, en Afghanistan, à Guantánamo, vis-à-vis de l'Iran et de la Corée du Nord, et j'en passe.
Obama a-t-il la moindre marge de manoeuvre politique à l'égard d'Israël quand on se souvient de l'accueil enthousiaste du Congrès fait au discours de Netanyahou en mai dernier, qui était en totale contradiction avec la politique du président américain?
Curieusement, Israël semble avoir disparu des radars d'Obama et de ceux du Congrès depuis cet automne. Seuls la droite religieuse et les juifs conservateurs continuent de faire une fixation sur Israël. C'est probablement en raison des gros soucis économiques, conjugués à une certaine usure de la politique étrangère à la suite d'une décennie d'engagement militaire en Irak, en Afghanistan et au Moyen-Orient, en général.
S'il bénéficie d'une victoire écrasante en novembre, Obama aura une grande marge de manoeuvre car la droite religieuse et les juifs conservateurs auront perdu; mais si sa victoire est courte, il n'aura presque aucune marge. S'il perd, bien sûr, nous reviendrons au temps béni biblique de George W. Bush. Le vrai risque pour Obama est celui de l'Iran. L'Iran peut tout changer à la politique des Etats-Unis vis-à-vis d'Israël. Une possibilité intéressante serait qu'Obama incite Hillary Clinton à concourir à la vice-présidence et qu'il nomme Joe Biden secrétaire d'Etat. Franchement, j'espère que c'est ce qu'il va faire. Si la Convention démocrate de l'été prochain désigne un ticket Obama-Clinton, souvenez-vous que vous l'aurez lu pour la première fois ici même!
Compte tenu de la médiocrité des candidats républicains actuellement déclarés, Obama ne sera-t-il pas réélu par défaut? Pensez-vous qu'un second mandat lui permettrait de s'affirmer davantage comme un homme de gauche?
La médiocrité d'un candidat l'a rarement dissuadé de se présenter à la présidence, et ne l'a presque jamais empêché d'être élu. Et grâce au poids écrasant des pseudo-débats télévisés, et à l'avalanche, tout au long de l'année électorale, de spots de campagne aussi agressifs que luxueux, c'est peut-être encore plus vrai aujourd'hui que par le passé, du temps où nous élisions des médiocres comme Ronald Reagan, Bush père, puis Bush fils.
A moins d'un redressement spectaculaire de l'économie qui se ferait sentir ailleurs qu'à Wall Street et dans les conseils d'administration des multinationales, et qui permettrait aux travailleurs des classes moyennes, aux personnes âgées et aux jeunes de ne plus craindre pour leur avenir immédiat, pratiquement n'importe quel républicain un tant soit peu télégénique est susceptible de battre Obama en novembre prochain. D'autant plus que la politique étrangère ne sera pas un enjeu de la campagne.
Une candidature conjointe de Romney à la présidence et de Gingrich à la vice-présidence - Mitt et Newt, l'irrésistible duo évoqué plus haut - cimenterait le Parti républicain: les centristes et les indépendants seraient ravis de soutenir Romney, tandis que l'aile droite du parti, les fidèles des tea parties, les fondamentalistes chrétiens et les illuminés de l'anti-étatisme leur emboîteraient le pas, en espérant que Romney meure dès le début de son mandat et que leur héros accède à la présidence. Ça s'est déjà produit. Heureusement, Romney a l'air en bonne santé. Et ne semble pas complètement fou. Même s'il est mormon. Et ne me demandez pas ce que je pense des mormons!

Etats-Unis: Un débat très vif entre républicains avant la primaire-clé de Caroline du Sud


Créé le 20/01/2012 à 07h57 -- Mis à jour le 20/01/2012 à 08h28

MONDE - Newt Gingrich a de nouveau été interrogé sur son infidélité passée...

Le conservateur Newt Gingrich s'est vivement défendu jeudi soir d'avoir proposé à son ex-femme de former «un couple libre», au cours d'un débat télévisé marqué par des échanges agressifs entre les candidats républicains, deux jours avant la primaire-clé de Caroline du Sud. «Cette histoire est fausse», a lancé l'ancien président de la Chambre des représentants américaine, interrogé sur les déclarations de son ex-épouse dès le début du débat télévisé.
Dans un entretien diffusé jeudi soir par la chaîne de télévision ABC, mais dont des extraits ont été diffusés dès le matin, Marianne Gingrich assure qu'à l'époque de leur mariage, il lui avait demandé de former un couple «libre» pour continuer sa relation avec sa maîtresse d'alors, aujourd'hui devenue sa femme.

«J’en ai assez de ces médias élitistes»

«Tous mes amis qui nous connaissaient à l'époque vous diront que cette histoire est fausse», a insisté le candidat, dénonçant la couverture médiatique «méprisable» de l'entretien. «J'en ai assez de ces médias élitistes qui protègentBarack Obama en attaquant les républicains», a-t-il conclu, sous les vivats du public.
Aucun des adversaires de Newt Gingrich ne s'est du reste aventuré à tenter de profiter explicitement des affirmations de son ex-femme. Cela n'a pas empêché le ton du débat d'être agressif, notamment à l'égard du modéré Mitt Romney, le favori des sondages dont l'avance sur Newt Gingrich fondait ces derniers jours en Caroline du Sud.
Mis en cause à nouveau par l'ex-président de la Chambre des représentants sur son passé à la tête du fonds d'investissement Bain Capital et pour son refus de publier sa feuille d'impôt, Mitt Romney s'est défendu pied à pied. Mais s'il a assuré qu'il rendrait sa feuille d'impôts publique «en avril», quand elle sera «complète pour l'année en cours», Mitt Romney, dont la fortune est estimée à plusieurs centaines de millions de dollars, s'est fait huer quand il a à nouveau refusé de la publier avant le vote de samedi.

«Ce sont le capitalisme et la liberté qui rendent l'Amérique forte»

«Je ne vais pas m'excuser d'avoir réussi», a-t-il ensuite lancé, sous les applaudissements du public. «Je sais bien que le président Obama va nous attaquer durement sur ces thèmes-là», a poursuivi le candidat. «Mais nous allons lui faire rentrer dans la crâne que ce sont le capitalisme et la liberté qui rendent l'Amérique forte», a-t-il poursuivi.
Le chrétien ultraconservateur Rick Santorum - qui a appris jeudi que, contrairement à ce qui avait été initialement annoncé, il avait remporté le premier scrutin organisé début janvier dans l'Iowa - a de son côté également multiplié les piques en direction de Newt Gingrich et Mitt Romney. «Je ne veux pas que nous désignions un candidat dont je vais me demander tous les matins en ouvrant le journal ce qu'il a encore dit», a-t-il lancé en direction de Newt Gingrich.
 La course s'est brusquement resserrée jeudi en Caroline du Sud, à la faveur duretrait du gouverneur du Texas Rick Perry - absent du débat jeudi soir -, qui s'est rangé derrière Newt Gingrich.

33,6% des intentions de vote pour Mitt Romney

Le soutien de Rick Perry, ardent défenseur des valeurs chrétiennes, vient renforcer les chances de Newt Gingrich d'entraver la progression de Mitt Romney, aux positions plus modérées et qui peine à convaincre la base du parti républicain. Newt Gingrich espère consolider le vote conservateur du premier Etat du Sud des Etats-Unis à entrer dans la danse des primaires, mais doit faire face à la concurrence de M. Santorum et du représentant du Texas Ron Paul, un isolationniste aux positions atypiques.
Selon une moyenne de plusieurs sondages réalisée jeudi avant le débat par RealClearPolitics, Mitt Romney obtenait 33,6% des intentions de vote en Caroline du Sud contre 26% pour M. Gingrich.
Après sa victoire la semaine dernière dans le New Hampshire (nord-est), Mitt Romney serait quasiment assuré de décrocher l'investiture de son parti s'il l'emportait en Caroline du Sud, un Etat qui depuis 1980 a toujours voté majoritairement lors des primaires républicaines pour le candidat finalement investi par le parti.
Le processus des primaires doit se poursuivre Etat par Etat jusqu'à l'été.

VIDEO. Primaires US : Newt Gingrich écrase Romney en Caroline du Sud


Columbia (Carolin du Sud), samedi soir. L'ultraconservateur Newt Gingrich a remporté la primaire républicaine de l'Etat devant Mitt Romney.

Columbia (Carolin du Sud), samedi soir. L'ultraconservateur Newt Gingrich a remporté la primaire républicaine de l'Etat devant Mitt Romney. | AFP/PAUL J. RICHARDS

Zoom
Le conservateur Newt Gingrich a remporté samedi une victoire écrasante sur Mitt Romney en Caroline du Sud, relançant spectaculairement la campagne des primaires républicaines en vue de la présidentielle américaine face à un rival longtemps considéré comme favori.

Lors d'un discours triomphal, le vainqueur a repris l'antienne populiste qui lui a si bien réussi pendant la campagne, attaquant tour à tour l'élite, les médias et le  , qu'il a accusé d'avoir infligé «une catastrophe» au pays. 
Sa victoire en Caroline du Sud, a-t-il expliqué, est celle des Américains «qui pensent que les élites de Washington et New York ne les comprennent pas, ne se préoccupent pas d'eux, ne sont pas dignes de confiance et, en fin de compte, ne les représentent pas du tout!» 

Mitt Romney, qui comptait sur la Caroline du Sud pour laisser définitivement sur place ses rivaux, a reconnu sa défaite, estimant que la course serait «longue» et «encore plus intéressante». L'ex-gouverneur du Massachusetts, qui incarne si bien les élites vouées aux gémonies par M. Gingrich, s'est cependant dit convaincu de finir par affronter Barack Obama à la présidentielle du 6 novembre.

Selon les résultats définitifs, Newt Gingrich, ancien président de la Chambre des représentants qui avait été le cauchemar du président  dans les années 1990, a remporté 40,4% des voix contre 27,9% à M. Romney. Les deux hommes sont loin devant les deux autres candidats encore en lice, le catholique ultraconservateur Rick Santorum et l'isolationniste Ron Paul, qui ont recueilli respectivement 17% et 13% des voix.

«La partie est relancée»
La déconvenue est rude pour le multimillionnaire Romney, longtemps donné gagnant dans cet Etat conservateur du sud-est du pays: il y a compté jusqu'à près de 20 points d'avance dans les sondages. Malgré son organisation hors pair et ses moyens financiers, il a été victime dans les derniers jours de la campagne des talents de polémiste démontrés par M. Gingrich lors des débats télévisés et d'une controverse sur sa déclaration de revenus, qu'il s'est finalement engagée à publier, mais seulement au mois d'avril. John Silvers, un sexagénaire interrogé au quartier général de Newt Gingrich à Columbia, la capitale de l'Etat, a expliqué s'être rallié à ce dernier après l'avoir vu dénoncer sans retenue la gauche et les médias à la télévision.

Tous les regards se tournent désormais vers la Floride où se jouera le 31 janvier la prochaine étape des primaires, dans un parti républicain plus divisé que jamais. «La partie est relancée», a déclaré sur CNN le candidat Rick Santorum, rappelant qu'il avait emporté (d'un cheveu) le premier scrutin organisé au début du mois dans l'Iowa (centre), Mitt Romney le New Hampshire (nord-est) et à présent Newt Gingrich la Caroline du Sud. M. Gingrich, 68 ans, espère de son côté rassembler le vote conservateur après avoir obtenu jeudi le ralliement de Rick Perry, le gouverneur du Texas qui a abandonné la course des primaires.
Il a su faire face jeudi à la diffusion d'un entretien télévisé d'une de ses ex-épouses, Marianne, dans lequel cette dernière revenait sur les infidélités passées de M. Gingrich, des propos embarrassants notamment auprès de l'électorat évangélique. M. Gingrich a rejeté en bloc ces accusations, fustigeant les «médias élitistes qui protègent Barack Obama en attaquant les républicains».


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